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Dakowska, Dorota |
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Professeure de science politique à Sciences Po Aix, associée au laboratoire Triangle
dorota.dakowska@sciencespo-aix.fr
La dimension internationale des réformes de l’enseignement supérieur
Depuis quelques années, mon intérêt pour les interactions entre les acteurs situés dans l’espace national et européen porte sur les transformations de l’enseignement supérieur. Le programme de recherche-formation du CIERA intitulé « L’académie en chantier. Transformations des universités centre-est européennes depuis 1989 », que j’ai initié et co-animé (2011-2013) a été l’occasion de revenir à la phase initiale des transformations des champs académiques après la chute des régimes communistes, puis de se pencher sur la réception du « Processus de Bologne ».
Le séminaire itinérant « Bologna from Below » que j’ai initié avait pour but de consolider l’équipe de chercheurs intéressés par les aspects internationaux des réformes de l’enseignement supérieur. La participation au projet Interdisciplinaire IDEX-CNRS intitulé CIGE (Construction et usages des indicateurs dans la gouvernance européenne) visait à contribuer à la réflexion sur le « gouvernement par les nombres » pratiqué par les instances telles que l’OCDE et la Commission européenne.
Le cas de l’enseignement supérieur permet d’articuler la réflexion sur la circulation internationale des injonctions à la réforme, l’émergence d’une expertise internationalisée et la gestion des héritages historiques plus anciens. Ce travail s’intéresse à la manière dont l’agenda européen et international est utilisé dans les politiques de l’enseignement supérieur et dans la reconfiguration des rapports entre différents acteurs impliqués dans la construction des problèmes publics.
Émergence et circulation des fondations politiques
Ma thèse de doctorat portait sur la place des fondations proches des partis dans l’action publique extérieure allemande. Partant d’une analyse sociohistorique de l’émergence et de l’institutionnalisation – contestée – de ces organisations dans le champ politique allemand, je me suis penchée sur l’implication de ces « professionnels de la démocratie » dans les transformations post-communistes et dans l’élargissement de l’Union européenne.
Dans le prolongement de ma thèse, j’ai lance une enquête sur la circulation du modèle de fondations politiques, où j’ai analysé les mobilisations ayant conduit à l’officialisation de « fondations politiques au niveau européen » à Bruxelles. Cette analyse croise l’analyse sociologique d’une mobilisation transnationale avec une interrogation plus générale sur la transformation des politiques de communication, telles qu’elles sont promues au niveau européen. Elle montre comment, dans un contexte de remise en cause de l’architecture institutionnelle et des politiques communautaires, la mobilisation de dispositifs participatifs apparaît comme un moyen de travailler l’image des institutions communautaires. Elle permet d’apprécier comment des entrepreneurs issus de différents espaces nationaux mobilisent les appuis dont ils disposent au sein des institutions européennes.
Les usages politiques et sociaux de l’intégration européenne
Si mes travaux se sont penchés sur les usages de l’intégration européenne, je m’intéresse aussi au rapport de différents acteurs sociaux à l’Europe communautaire.
Le processus de l’élargissement constitue, certes, un cadre contraignant pour les pays candidats, marqué par la position de la Commission européenne. Le terme de « négociations d’adhésion » recouvre, de fait, une relation asymétrique : les pays candidats doivent « absorber » l’acquis communautaire. Mais ce processus constitue en même temps une opportunité pour les acteurs des deux côtés, qui leur permet de se repositionner dans les configuration dont ils font partie, voire d’accéder à des ressources supplémentaires.
L’intérêt pour les usages politiques et sociaux de l’intégration européenne m’a conduite à rejoindre le projet ANR « Conceptions ordinaires de l’Europe – CONCORDE » coordonné par Daniel Gaxie et financé par l’Agence nationale de la Recherche (ANR) (2006-2009). Ce projet a été l’occasion de développer la réflexion sur les conditions et les termes de la comparaison des attitudes à l’égard de l’intégration européenne.
Poursuivant la discussion sur les transformations des espaces politiques sous l’effet de l’intégration européenne, j’ai contribuée au projet de recherche « jeunes chercheurs » sur la « Reconfiguration des jeux ‘populistes’ en Europe – EUROPOPULISM », financé par ANR (2005-2008). Dans ce cadre, je me suis penchée sur le recours critique à l’Europe par les partis de la droite radicale polonais.
Des transformations post-communistes à l’européanisation
La participation à différents projets de recherche collective sur la gestion politique de l’héritage du communisme puis sur « Les dispositifs participatifs locaux » m’a permis d’approfondir la réflexion sur la circulation transnationale de dispositifs et sur les liens entre le niveau international, communautaire, national et local.
Parallèlement à mes recherches de thèse, je me suis intéressée aux usages à la gestion de l’héritage de la période communiste, notamment à travers la manière dont les acteurs politiques, ainsi que ceux issus de l’espace académique, se réfèrent à ce passé pour se repositionner dans le jeu politique ou pour réclamer la mise en place de politiques publiques singulières. Relatives à la gestion des archives, ces « politiques du passé » peuvent se référer à des expériences situées à l’étranger, ce qui leur confère une dimension transnationale. Dans le cadre du projet portant sur la gestion des « passés douloureux » en Europe, je me suis penchée sur l’instrumentalisation du passé dans les relations germano-polonaises.
Attentive aux liens entre les injonctions extérieures et des dynamiques localisées, je me suis intéressée aux tensions et aux jeux de pouvoir que pouvait impliquer la mise en place de dispositifs participatifs au niveau local. La participation au projet de recherche PICRI « Les dispositifs participatifs locaux » (2006-2009) m’a permis d’analyser la diffusion d’éléments de la « démocratie participative » au niveau local dans le cadre d’une initiative coordonnée par le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en Pologne. Ce travail collectif nous a permis de constater que les dispositifs qualifiés de « participatifs » connaissent de fortes variations selon le contexte.
Publiés au sein du laboratoire, depuis 2010 :
Pascal Bonnard, Dorota Dakowska & Boris Gobille (dir.), Faire, défaire la démocratie : de Moscou, Bogota et Téhéran au conseil de l’Europe , Karthala ; Sciences Po Aix, 2021