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/ Archives : colloques et journées d’études 2005 - 2016Colloque international : « Lobbying et groupes d’intérêt au cœur du champ européen du pouvoir »lundi, 9 novembre 2015 |
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10 mars 2015 (Sciences Po Lyon, Amphi Leclair)
14h30-18h : Le lobbying dans la construction des politiques publiques et du système institutionnel européen
Président-discutant : Niilo Kauppi, Academy of Finland
11 mars 2015 (Sciences Po Lyon, Amphi Leclair)
9h30-13h00 : L’européanisation des groupes d’intérêt
Présidente-discutante : Corinne Gobin (Graid – ULB)
14h30-18h : Une pratique controversée : encadrement, moralisation et professionnalisation du lobbying
Président-discutant : Antoine Vauchez (CESSP, Paris I)
Les groupes d’intérêts ont très tôt constitué un objet privilégié des études européennes. Ils ont ainsi d’abord été perçus comme des vecteurs du processus d’intégration européenne, notamment parce qu’en « transférant » leurs activités au niveau communautaire, ils alimenteraient une « demande » de normes à cette échelle, et en conforteraient la légitimité (Haas, 1958). Par la suite, c’est plus généralement la question de leur contribution à la construction des politiques publiques qui retient l’attention de la littérature, les auteurs s’attachant à caractériser un modèle européen de relations entre institutions et groupes d’intérêts de type « néo-pluraliste » marqué par sa forte ouverture (Mazey, Richardson, 1993 ; Ayberk, Schenker, 1998 ; Hooghe, Marks, 2001), à comprendre les répertoires d’action mobilisés (Balme, Chabanet, Wright, 2002 ; Greenwood, 2003 ; Bouwen, 2004 ) ou encore le niveau et les modalités d’investissement dans les dynamiques institutionnelles européennes (Klüver, 2013 ; Sanchez Salgado, 2014). En retour, les travaux s’essaient aussi à penser les effets de l’européanisation sur les modes d’action privilégiés par ces acteurs (Mahoney, 2004 ; Beyers, 2004) et plus récemment sur leurs recompositions et transformations aux échelles nationale et locale (Eising, 2007).
Sur ces différentes dimensions, les apports des travaux qui revendiquent depuis une dizaine d’année et de diverses manières une lecture sociologique de l’UE (Politique européenne, 2008) ont été importants. L’intérêt pour les acteurs qui incarnent ces métiers (Michel, 2005), et leurs trajectoires sociales et professionnelles, a ainsi souligné la diversité des ressources dont ils disposent, mais aussi les rapprochements progressifs de leurs logiques de recrutement, ou encore la similitude des pratiques et des représentations propres à une partie des lobbyistes avec celles des agents « officiels » des institutions (Courty, Michel, 2012 ; Sacriste, 2014). Les enquêtes ont également mis en évidence les processus de coproduction, tant par les institutions que par les acteurs socio-économiques, des intérêts et des acteurs-organisations susceptibles de les porter à l’échelle européenne (Georgakakis, de Lassale, 2007 ; Hauray, 2006 ; Michel, 2013). L’attention portée à l’histoire et au fonctionnement des organisations a pour sa part permis de dénaturaliser et penser les conditions de possibilité du passage à l’Europe, et la dimension fortement concurrentielle du travail de construction et de représentation des intérêts à cette échelle (Laurens, 2013).
Dans le prolongement de ces travaux, le colloque organisé à Lyon les 10 et 11 mars 2016 propose ainsi de s’intéresser aux représentants d’intérêts, à leurs discours, représentations et pratiques, non seulement pour comprendre les processus de formulation de l’action publique à l’échelle européenne, mais aussi pour mieux saisir, sur le temps long, les dynamiques à travers lesquelles s’institue progressivement un champ européen du pouvoir (Kauppi, 2005 ; Cohen, 2013) dont ils constituent, avec d’autres « permanents de l’Europe » (Georgakakis, 2012), une pièce centrale. Dans cette perspective, il attend des contributions qui, à partir d’enquêtes empiriques sur les acteurs sociaux et organisations engagés dans des activités de représentation d’intérêt, à l’échelle européenne mais aussi aux échelles nationale et locale, pourront explorer trois grands types de questionnements :
Un premier aspect de cette réflexion concerne la sociogenèse des pratiques caractéristiques du lobbying européen et l’analyse de leurs transformations. Dans le prolongement des travaux d’Hélène Michel et Sylvain Laurens (2013) sur les représentants patronaux ou encore d’Anne-Catherine Wagner sur les syndicalistes (2009), il est attendu des communications qu’elles permettent de compléter la « cartographie » des acteurs de l’Europe en renseignant sur ce que sont les « lobbyistes » ou représentants d’intérêt : de quelles régions de l’espace social des Etats membres sont-ils issus ? De quels parcours scolaires, et formations sont-ils le produit ? Comment rendre compte des carrières qui sont les leurs ? Ce questionnement couvre plusieurs dimensions complémentaires. Il vise d’abord à éclairer les relations entre trajectoires et pratiques des représentants d’intérêts : comment en particulier, les dispositions et ressources sociales de ces derniers (savoir-faire mondains ou militants, capital social, expériences des institutions européennes ou des univers propres aux élites de la mondialisation) participent-elles autant sinon plus que les nécessités fonctionnelles de l’activité à la construction des multiples dimensions des métiers du lobbying ? Il soulève également la question de la progressive stabilisation de ces pratiques et des modalités/vecteurs de leur institutionnalisation : dans quelle mesure les savoirs ou savoir-faire associés au lobbying auprès des institutions européennes ont-ils été progressivement standardisés au travers par exemple de centres de formation spécialisés, et de filières de recrutement ? Comment y contribuent pour leur part les logiques de carrière et les formes de circulation qu’elles favorisent entre les organisations ? Quel rôle jouent les entreprises de moralisation (Dinan, Miller, 2007), le développement de formes de règlementations, d’encadrement, encore infra juridique, de ces activités ? On s’intéressera enfin à la manière dont les pratiques des lobbyistes s’ajustent et contribuent aux transformations qui affectent les institutions européennes : comment s’est traduite par exemple, la montée en puissance des eurodéputés dans le processus décisionnel, à partir du milieu des années 1990 (Hix, Hoyland, 2013) ?
De manière complémentaire, une deuxième dimension de la réflexion engagée dans ce colloque consistera à s’intéresser aux modalités selon lesquelles le développement et l’institutionnalisation du lobbying contribuent plus largement à l’intégration du système politique européen. Il s’agit ici de prendre au sérieux le travail politique engagé par les représentants d’intérêts et les modalités selon lesquelles ils participent, de multiples manières, à l’élaboration de l’action publique. A distance d’une conception unidirectionnelle des relations entre ces groupes et les institutions fondée sur le postulat de leur influence, il conviendra de prêter attention aux logiques concrètes du « passage » et de la circulation d’idées, de savoirs, de représentations de la réalité entre les différents acteurs du gouvernement de l’Europe (Smith, 2004). Les lobbyistes ont été sur ce point bien identifiés comme des relais entre les institutions européennes et les intérêts sociaux dont ils contribuent à construire et rendre acceptables les revendications. En revanche, l’accent est moins souvent mis sur la manière dont ils alimentent et façonnent les échanges interinstitutionnels, notamment en participant de la constitution des alliances à géométrie variable sur lesquelles reposent la construction des compromis. Une telle perspective invite les contributions à interroger cette position de centralité que parviennent à occuper certains représentants d’intérêts et les ressources qu’elle implique d’activer. On pourra aussi s’intéresser au développement des stratégies professionnelles et logiques de recrutement qui favorisent le franchissement des frontières entre espaces institutionnels et de la représentation d’intérêt.
Une troisième et dernière perspective de recherche encouragée dans ce colloque consiste à s’intéresser à la manière dont l’intégration croissante des dimensions européennes dans les activités sociales ordinaires transforme concrètement les groupes d’intérêts. Les travaux sur les syndicats (Claeys, Gobin, Smets, 1998 ; Gobin, 2002 ; Wagner, 2005, 2009) ont bien mis en évidence les effets associés à la professionnalisation ou à la technicisation de leurs représentants ou permanents à Bruxelles. On sait en revanche peu de choses encore, en dehors des travaux de Julian Mischi, Antoine Roger, ou encore Julien Weisbein (Mischi et Weisbein, 2004 ; Roger 2010a et b), sur la manière dont l’européanisation affecte la pratique plus générale de leurs membres : les modes de structuration interne, les modes de recrutement des dirigeants, les thématiques légitimes propres à susciter leurs intérêts, etc. A la manière de ce qui a été fait pour les partis politiques (Ladrech, 2002), on s’intéressera donc aux changements programmatiques et organisationnels ainsi qu’aux dynamiques de la compétition sociale et politique qu’induit l’enjeu européen dans les espaces considérés. Plus généralement, il s’agit de s’intéresser à la manière dont l’Europe fait sens, ou non, dans le fonctionnement ordinaire des individus, des collectifs ou groupes mobilisés propres aux différents espaces sociaux nationaux.
Mobilisant différentes traditions scientifiques et techniques d’enquête, les communications pourront s’inscrire directement dans ces perspectives ou proposer des questionnements inédits. Sont prioritairement attendues les communications mobilisant des enquêtes empiriques.
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