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/ Colloques - journées d’étude10e Congrès de l’Association Française de Sociologie (AFS) : « Intersections, circulations »vendredi, 7 juillet 2023 |
Les individus, les idées, les savoirs, les biens ou encore les virus circulent largement, à l’intersection de plusieurs espaces et rapports sociaux. Ces circulations sont parfois souhaitées ou recherchées, donnant lieu à des échanges, des hybridations, des appropriations. Elles sont aussi contestées, en raison de leurs conséquences sur l’environnement, la santé ou au nom d’un risque, d’un danger ou d’une idéologie. Les conflits, les guerres, les politiques migratoires nous rappellent le poids des frontières et de leurs effets matériels et symboliques. Ces différents constats invitent les sociologues à penser les circulations et les intersections, et posent des questions très concrètes. Comment les travailler, les caractériser, les documenter et les analyser en sociologue ? De quelle façon identifier l’importance de ces phénomènes, leurs transgressions et leurs transformations ? Ce sont là quelques interrogations que nous aborderons lors du Congrès de l’Association française de sociologie organisé à Lyon en 2023 avec le Centre Max Weber et le laboratoire Triangle. Nous soulignerons les enjeux théoriques de ces problématiques, la diversité des situations observées ainsi que les tensions que ces catégories font apparaître.
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avec notamment la conférence semi-plénière :
1.3 Les espaces sociaux du militantisme : circulations, intersections et multipositionnalité
5 juillet, 14h30-16h30
Lieu : Amphi Aubrac (Bât. DEMETER)
En France et ailleurs, les années 2010-2020 ont été synonymes de mobilisations collectives nombreuses, saisissables d’abord par les causes (ré)investies, pouvant se trouver opposées : mobilisations en faveur des minorités raciales et de genre ; écologistes, environnementales et animalistes ; liées à la dégradation du travail, de l’État social et du niveau de vie ; ou, au contraire, luttant contre le mariage entre personnes de même sexe, le droit à l’avortement, les vaccins ; défendant la blanchité, une masculinité hégémonique et des identités nationales fantasmées ; sans oublier celles plus feutrées de dominantes économiques visant à assurer leurs positions sociales. On peut faire aisément l’hypothèse que ces mobilisations ont été synonymes, au moins partiellement, d’une évolution des propriétés sociales des militant-es, de même que des modes d’action. Plus encore, elles semblent inséparables de transformations de la morphologie de ou des espaces sociaux militants, qu’il s’agisse des systèmes de positions et de prises de positions en leur sein et des frontières et donc de circulations et intersections qui les délimitent d’autres espaces sociaux plus ou moins autonomes. C’est précisément à cette dimension relationnelle et structurale du militantisme que cette semi-plénière entend se consacrer.
En effet, l’actualité des mobilisations est redoublée de débats scientifiques importants sur cette thématique. En 2021, Social Movement Studies, l’une des revues internationales les plus reconnues dans l’étude des mouvements sociaux et du militantisme, publiait un numéro spécial intitulé "Conceptualizing the Context of Collective Action : Field, Space, Arena", réunissant et faisant dialoguer les uns avec les autres des cadres conceptuels qui proposent d’analyser les formes de l’action collective, les relations et intersections entre espaces militants et autres espaces sociaux, les positions qu’occupent les acteurs et actrices dans ces espaces, les enjeux et les logiques qui les structurent. En écho à ces débats théoriques, en France, plusieurs concepts sont régulièrement mobilisés pour penser les liens entre différents espaces de pratiques militantes, comme ceux d’espace des mouvements sociaux, d’espace de la cause des femmes, d’espace de la cause des étrangers, de champ militant, de champ syndical, ou encore de monde associatif. Ces sphères sociales différenciées sont notamment structurées par des organisations qui coopèrent plus ou moins, selon des modalités diverses, peuvent être en concurrence et en opposition. Par ailleurs, la notion de "multipositionnalité", élaborée par Luc Boltanski dans un article devenu classique, a été mobilisée par de nombreux chercheurs et chercheuses pour rendre compte des phénomènes de cumul de positions dans plusieurs espaces distincts et saisir la porosité ou au contraire l’imperméabilité des frontières les séparant. La multipositionnalité des individus est l’un des éléments de structuration des espaces ou des champs, mais aussi un phénomène par lequel des formes de porosité et d’hétéronomie existent entre les sphères sociales. Enfin, l’ouvrage Microcosmes, paru au début de l’année 2022, regroupe de nombreux textes de Pierre Bourdieu élaborant sa théorie des champs et dresse un état des lieux des débats autour de ce concept incontournable, que des chercheurs.ses spécialisé-es sur le militantisme ont amendé pour rendre compte de la malléabilité et des fortes porosités des sphères militantes (cf. supra).
À l’aune de cette actualité sociale et scientifique, l’ambition de cette semi-plénière est de rassembler des chercheurs et chercheuses dont les travaux s’attachent à saisir les sphères sociales structurant les pratiques militantes, les mobilisations, les engagements et les constructions de causes et les relations qu’elles entretiennent entre elles. Il ne s’agira pas seulement de susciter un débat strictement théorique, mais également de nourrir une réflexion méthodologique sur les usages des concepts existants, leurs limites et leurs angles morts, ainsi que leur place dans la construction de l’objet, à partir des terrains de recherche des intervenant-es. On s’intéressera plus particulièrement à l’articulation entre associations, syndicats et partis politiques, ce qui invitera à tenir compte des formes organisationnelles dans leur historicité, des pratiques et représentations qui s’y sont sédimentées, sans limiter les interrogations empiriques à la France.
Organisation : RT18, RT34 et RT35
Intervenant-es : Sophie Béroud (U. Lyon 2, Triangle), Yoletty Bracho (U. Lyon 2, Triangle), Clémentine Comer (U. Paris-Dauphine, IRISSO) et Maxime Quijoux (CNRS, Lise).
Animation : Clément Petitjean (U. Paris 1, CRIDUP), Sophie Rétif (U. de Nanterre, IDHES)