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Colloque international organisé par Jean-Claude Zancarini et Pierre Girard : Violence politique et mouvements sociaux dans l’Italie des années 70

11 mai 2007, et 12 Mai 2007, à l’ENS LSH, Lyon, salle F122
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Organisation et comité scientifique

Jean-Claude Zancarini, professeur d’Italien à l’ENS LSH, directeur de l’UMR 5206, Pierre Girard, maître de conférence d’Italien à L’université Jean Moulin Lyon3, CERPHI-UMR 5037, Boris Gobille, maître de conférences à l’ENS LSH et Romain Descendre, maître de conférences à l’ENS LSH.

Objet du colloque

Présenter deux journées d’études sur les mouvements de lutte armée en Italie et plus généralement sur la violence politique suppose affronter plusieurs obstacles, de nature différente. Le premier type d’obstacle, qui peut en un certain sens apparaître aussi comme un avantage, renvoie à la proximité diachronique des phénomènes étudiés. Certes, cette proximité permet des témoignages directs, et surtout de faire s’entrecroiser (cela est très visible dans la bibliographie) des textes ayant des niveaux rhétoriques très différents entre eux : essais, interviews, témoignages, romans, documents, textes anonymes, etc. Cela dit, cette proximité peut aussi bien apparaître comme un problème, dans la mesure où le temps qui sépare l’observateur de la période étudiée n’est pas assez long, et semble empêcher du même coup un regard objectif. L’apparition récente des « Nouvelles Brigades rouges », montre à quel point la question du terrorisme n’est pas fermée en Italie, en particulier dans la manière dont ces mouvements sont perçus dans l’opinion publique et dans la classe politique. En d’autres termes, on a le sentiment que cette proximité semble empêcher toute analyse objective, et ne permet que des appréciations politiques et morales.Cela dit, cette proximité peut aussi bien apparaître comme un problème, dans la mesure où le temps qui sépare l’observateur de la période étudiée n’est pas assez long, et semble empêcher du même coup un regard objectif. L’apparition récente des « Nouvelles Brigades rouges », montre à quel point la question du terrorisme n’est pas fermée en Italie, en particulier dans la manière dont ces mouvements sont perçus dans l’opinion publique et dans la classe politique. En d’autres termes, on a le sentiment que cette proximité semble empêcher toute analyse objective, et ne permet que des appréciations politiques et morales.

Cela dit, et la nuance que nous avançons ici justifie dans une certaine mesure l’idée même de notre projet, ce qui était encore vrai il y a une dizaine d’années, est en train de changer, comme si l’on se trouvait à un point d’inflexion où le jugement politique et moral laisse la place à un regard critique et scientifique sur la période. Plusieurs éléments expliquent cette situation. Nous pouvons tout d’abord penser à la chute du bloc soviétique, ainsi qu’à la fin du risque agité du chaos révolutionnaire . L’approche du mouvement de lutte armée est plus facile de nos jours. Le résultat en est une production soutenue de livres renvoyant à la période des années 70. On a le sentiment que peu à peu les acteurs de cette période sont devenus, dans les deux camps, les spectateurs d’un passé qu’ils essaient de comprendre et de rendre compte. Dans cet ordre d’idée, les témoignages des procureurs, des juges, d’anciens membre de la Digos renvoient à ceux des brigadistes. Même si la situation est fragile, le fait est qu’on peut à présent parler de cette période en Italie, et que d’une manière générale, une volonté de compréhension apparaît de manière manifeste. Certes, les livres n’ont pas tous la même valeur : l’invective, la rancœur, voire la haine persistent chez certains, mais malgré tout, on sent ce passage sous-jacent, cette transition entre la politique et la réflexion historique et sociologique.

Dans cette perspective, notre approche, en France, a une configuration particulière, dans la mesure où nous sommes liés à ces années de plomb. D’une part, parce qu’en France, des mouvements de lutte armée se sont aussi développés, tels Action directe, même si leur amplitude et leur nature les rendent incommensurables et parfaitement hétérogènes à la situation italienne. Mais surtout, la France accueille des réfugiés politiques italiens de ces années-là. Par ailleurs, des livres sortent depuis quelques années, qui manifestent un intérêt accru en France sur cette période particulière de l’histoire italienne récente. Nous pouvons citer l’étude classique d’Isabelle Sommier (La violence politique et son deuil. L’après 68 en France et en Italie, Presses Universitaires de Rennes, 1998), la traduction des lettres d’Aldo Moro écrites pendant sa détention par les Brigades Rouges (Aldo Moro. « Mon sang retombera sur vous ». Lettres retrouvées d’un otage sacrifié, mars-mai 1978, Paris Tallandier, 2005), un livre témoignage d’Alberto Franceschini : les Brigades Rouges. L’histoire secrète des Br racontée par leur fondateur, Paris, Du Panama, 2005), ainsi que très récemment une enquête d’Emmanuel Amara : « Nous avons tué Aldo Moro », Paris, Editions Patrick Robin, 2006.

Ce regain d’intérêt pour les « années de plomb » italiennes s’accompagne également de nombreux travaux universitaires récents, en histoire, en sciences politiques ou en italien. De nombreux étudiants ouvrent des perspectives de recherche nouvelles sur ces années, profitant à la fois d’une ouverture des archives, en particulier de celles des différentes commissions parlementaires, mais aussi, plus généralement, profitant du recul désormais suffisant pour parler de ces années. Notre projet se fonde sur ces recherches récentes. Nous voudrions faire le point sur ces travaux et tenter de voir quelles en sont les méthodes et les perspectives. Notre approche se veut également pluridisciplinaire, faisant se mélanger les historiens, les spécialistes de sciences politiques, de cinéma, les italianistes. Notre projet n’est pas de déterminer quelle fut la « vérité » de ces années difficiles, mais de proposer des interprétations, d’étudier les diverses représentations qui en sont données (cinéma, littérature), de discerner comment les années de plomb s’insèrent dans la mémoire italienne et quels sont ses modes de diffusion. Notre rencontre se voudra donc très attentive au langage employé pour parler de ces années, au choix de tel ou tel vecteur de communication. À nouveau, il s’agira pour nous de discerner quelles sont les lignes thématiques et problématiques les plus actuelles dans la recherche. Pour faciliter un tel travail, nous avons également voulu de manière volontaire réunir plusieurs générations de chercheurs, en laissant une grande place aux plus jeunes afin de confronter de la manière la plus féconde possible les méthodes d’études sur les années de plomb italiennes.

Programme

Vendredi 11 mai

9h00. Accueil des participants

Présidence : Prof. Guido Crainz

    • 9h30. Jean-Claude Zancarini (ENS LSH/Triangle) / Pierre Girard (Lyon 3) : Ouverture et introduction problématique.
    • 10h00. Guido Crainz (Università di Teramo) : Gli anni 70 in Italia.
      Pause
    • 11H00. Charlotte Moge (Université Lyon 3) : « Portella della ginestra » et les ambiguïtés de la naissance de l’Italie républicaine.
    • 11h30. Sarah Illouz (ENS LSH) : Aldo Moro : représentations d’un prisonnier politique.
      Discussions et pause repas

Présidence : Prof. Xavier Vigna

    • 14h30. Céline Pruvost (ENS LSH) : Le mouvement de 1977. L’exemple de Bologne.
    • 15h00. Pierre Girard (Université Lyon 3) : Lutte armée et prison : le « circuito dei camosci ».
      Pause
    • 16h00. Pauline Picco (Université Paris-IV Sorbonne) : De la rébellion à la lutte armée : le terrorisme d’extrême droite en Italie, 1977-1982.
    • 16h30. Jean-Claude Zancarini (ENS LSH) : « Un étrange bonheur » ou comment parler de ces années-là. Une lecture d’Erri de Luca.
      Discussions

Samedi 12 mai

Présidence : Prof. Jean-Claude Zancarini

    • 9h00. Marie Fabre (ENS LSH) : Mémoire et représentations cinématographiques de la lutte armée.
    • 9h30. Dora D’Errico (ENS LSH) : Cinéma et années de plomb en Italie, entre mémoire et oubli collectif : l’écriture cinématographique à la recherche d’une identité politique. CV en ligne
      Pause
    • 10h30. Xavier Vigna (Université de Bourgogne) : Des modèles italiens scindés. Les luttes ouvrières vues de France, 1969-1978.
    • 11h00. Canela Llecha (ENS LSH) : La situation espagnole. L’exemple du MIL.
    • Table ronde
      (en présence de Makram Abbès, ENS LSH ; Boris Gobille, ENS LSH ; Julien Fragnon, IEP Lyon ; Carmela Lettieri, Université Aix-en-Provence ; Marica Tolomelli Università di Bologna)
      Conclusions
    • Présentation du colloque de Bologne (Marica Tolomelli)
      RIPENSARE GLI ANNI SETTANTA
      Convegno Internazionale nel Trentennale del ’77
      Giovedì 27 -Venerdì 28- Sabato 29 Settembre 2007

Présentation des intervenants

Crainz Guido : Professeur des Universités, Université de Teramo. Auteur de nombreux articles sur les « années de plomb » en Italie, journaliste (Repubblica). Il est en particulier l’auteur de Il paese mancato, Roma, Donzelli, 2003 et de Storia del miracolo italiano, Roma, Donzelli, 2001.

D’Errico Dora : ancienne élève de l’ENS Ulm, agrégée d’italien, ATER à l’ENS LSH. Ses recherches portent sur le cinéma italien des années 70. CV en ligne

Fabre Marie : Elève de l’ENS LSH, agrégée d’italien. Ses recherches portent sur le cinéma italien des années 70.

Girard Pierre : Maître de conférences, Université Lyon 3. Auteur de Le vocabulaire de Vico, Paris, Ellipses, 2001, et de Recherches sur la pensée de Vico, Paris, Ellipses, 2002. Ses recherches portent sur la pensée politique italienne, du XVIIIe siècle à nos jours. Secrétaire éditorial de la revue Laboratoire italien (6 numéros parus depuis 2000).

Gobille Boris : Maître de conférences en Sciences politiques à l’ENS LSH. Ses recherches portent sur Mai 68 et ses conséquences en France. CV en ligne

Illouz Sarah : Elève ENS LSH, agrégée d’italien. Ses recherches portent sur l’affaire Aldo Moro.

Llecha Canela : Elève à l’ENS LSH, hispaniste. Ses recherches portent sur les mouvements terroristes espagnols des années 70, en particulier le MIL et le GRAPO.

Moge Charlotte : Université Lyon 3 (Master). Ses recherches portent sur la Sicile et les événements de « Portella della ginestra ». Elle poursuit actuellement ses recherches à l’Université de Venise.

Picco Pauline : Université Paris IV (Master). Ses recherches portent sur les mouvements terroristes italiens d’extrême-droite à la fin des années 70. Actuellement à l’Université de Rome.

Pruvost Céline : Elève à l’ENS LSH. Ses recherches portent sur le mouvement de 1977 à Bologne (Master).

Vigna Xavier : Maître de conférences en histoire, Université de Bourgogne. Ses recherches portent sur les mouvements ouvriers en France et en Italie (XIXe-XXe siècle).

Zancarini Jean-Claude : professeur à l’Ecole normale supérieure Lettres et Sciences hmaines, Lyon et directeur de l’UMR Triangle. Ses travaux actuels portent sur les liens entre histoire, langue et politique dans l’Italie du 16e siècle, notamment à propos de la pensée politique florentine, à l’époque des guerres d’Italie. Il a procuré, en collaboration avec Jean-Louis Fournel, les éditions françaises commentées de textes politiques italiens majeurs du 15e et du 16e siècle (Savonarole, Francesco Guicciardini, Machiavel). Il a publié : Le Droit de résistance, XIIe-XXe siècle, Fontenay-aux-Roses, ENS éditions, 1999 ; Lectures de Michel Foucault, vol.1. A propos de “ Il faut défendre la société ”, Lyon, ENS éditions, 2001 ; [avec Jean-Louis Fournel], La politique de l’expérience. Savonarole, Guicciardini et le républicanisme florentin, Alessandria, Edizioni dell’Orso, 2002 ; [avec Jean-Louis Fournel], Les Guerres d’Italie, Gallimard, “ Découvertes ”, 2003 ; [avec Jean-Jacques Marchand [dir.], L’historiographie florentine républicaine, 1494-1571, Florence, Cesati, 2003. ; [avec Michel Senellart [dir.], Discours de la guerre, dossier thématique de Mots, 73, automne 2003 ; [avec Alessandro Fontana, Jean-Louis Fournel et Xavier Tabet [dir.], Langues et discours de la République et de la guerre. Etudes sur Machiavel, Gênes, Name, 2004. CV en ligne

Modalités des interventions

Les résumés des exposés seront regroupés et insérés dans le dossier remis à chaque participant, cela afin d’anticiper et de faciliter les discussions. Les exposés ne devront pas dépasser 30 mn. Ils seront regroupés thématiquement. La langue pourra être aussi bien le français que l’italien.

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