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« L’internat n’est pas un gage de réussite scolaire pour les filières générales et technologiques » - Interview d’Hélène Buisson-Fenet
30 juin 2024, Lyon CapitaleTrois questions...
- Quelle a été l’évolution de l’internat dans le temps ?
En fait, l’internat n’a jamais été aussi populaire qu’en… 1850. A cette époque, rares étaient les élèves qui entraient au lycée. Il n’y avait pas les mêmes types ni les mêmes longueurs de scolarité. La sélection sociale était alors beaucoup plus forte. Plus d’un lycéen sur deux était interne. C’était le mode privilégié de scolarité. L’importance de l’internat se maintient jusqu’en 1970 (20% des élèves). Ensuite la fréquentation décroît fortement jusqu’au début des années 1990 (5% des élèves) où l’on observe un léger sursaut, mais pas non plus une vague. Aujourd’hui, c’est environ 3% des élèves. Il y a donc les représentations et il y a les chiffres. Cela s’explique par l’amélioration des infrastructures de transport, la diminution de la population rurale, un maillage plus dense du territoire scolaire et les nouvelles normes de parentalité. On ne veut pas donner l’impression d’abandonner son enfant. Cela ne signifie pas pour autant que les institutions ne font pas la promotion de ce modèle. On se rappelle du plan de relance en 2000 avec la “Prime à l’internat”. Puis, dans la foulée du plan Espoir Banlieu en 2008, la création des internats d’excellence, où il y a aujourd’hui plus de demandes que d’offres. Enfin, en 2019, le ministre Blanquer avait lancé le programme “Internat du XXIe siècle” avec 240 projets d’internats pour 13 000 jeunes comprenant tous les types de structures.
- Quels sont les profils d’élèves qui vont à l’internat ?
Il y a deux grandes figures d’internes. Le facteur géographique est déterminant. Dans les grandes agglomérations, le profil typique est celui d’un élève d’origine sociale bourgeoise, généralement dans un internat privé, souvent prestigieux. Mais la réalité la plus nombreuse est celle du lycéen en filière professionnelle qui ne trouve pas sa spécialité à moins de 50 km de son domicile. Il est souvent issu des classes populaires. Aujourd’hui, 58% des lycées publics proposent un internat. Ce sont les zones rurales, surtout dans la diagonale du vide, qui en comptent le plus : 90% de ces lycées publics en sont dotés. Ils font partie du volet social de la politique de l’Éducation car ils ont été construits pour scolariser ceux qui auraient fait deux heures de voiture par jour pour aller en cours. L’idée originelle était de mailler un maximum la carte scolaire surtout en dehors des grandes villes. Malgré cela, l’internat est plutôt une pratique des lycéens du privé : il y a plus d’internes du privé (4%) parmi les lycéens du privé que d’internes du public (3%) parmi les lycéens du public.
- Quel est l’impact de l’internat sur les résultats scolaires des élèves ?
Lorsque l’on compare les performances scolaires, on compare des sociologies particulières ainsi que des territoires particuliers. Il est difficile d’isoler les facteurs de réussite et dire que cette dernière est due à l’internat. Par exemple, si les parents de l’interne sont BAC+8, l’explication de la réussite sera plutôt de ce côté. Cependant, si l’on compare des externes et des internes à catégories sociales égales, professions des parents égales, lieu de domiciliation égales, on se rend compte que l’internat est très peu efficace dans la filière générale et technologique. L’internat n’est pas un gage de réussite scolaire. En moyenne on ne redouble pas. En moyenne, on a son baccalauréat etc. Dans la filière générale, l’internat ne change rien du point de vue des performances scolaires sur les résultats du baccalauréat. Ce n’est pas le cas pour l’internat professionnel : un interne a environ +10% de chance d’obtenir son baccalauréat par rapport à un externe. C’est tout de même signifiant.
Interview d’
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Hélène Buisson-Fenet :
Directrice de recherche CNRS section 40 (Politique, pouvoir, organisation) - Sociologie de l’éducation et de la formation